Paludisme : sommes-nous sur le point de le vaincre définitivement ?

Au cours des dernières décennies, la prévention du paludisme a connu des avancées majeures. Sommes-nous pour autant sur le point d’éradiquer totalement cette maladie ?
Le paludisme existe depuis les prémices de l’humanité. Sa mortalité a contribué à façonner l’histoire des Hommes et laisse toujours une cicatrice, génération après génération. Le paludisme reste la maladie la plus mortelleconnue de l’homme : elle infecte des centaines de millions de personnes et de personnes et tue des centaines de milliers de personnes chaque année.
Notre combat contre le paludisme est long et difficile. Depuis que Ronald Ross a découvert, en 1897, que les parasites du paludisme pouvaient être transmis par des moustiques Anophèles infectés, nous combattons la maladie et son vecteur. Près de la moitié de la population mondiale vit aujourd’hui dans des régions où existe un risque de transmission du paludisme.
Au cours du siècle dernier, des médicaments et des actions de lutte antivectorielle capables de traiter et de prévenir l’infection par le paludisme ont été conçus. Mais la route est encore longue, d’une part parce qu’il reste très difficile d’atteindre les populations à risque dans les régions isolées, et d’autre part en raison de l’apparition d’une résistance croissante aux antipaludéens et aux insecticides.Relever ce défi nécessite un effort global colossal. Sommes-nous aujourd’hui sur le point de vaincre notre plus vieil ennemi ?
Une success story du XXIe siècle
Depuis l’an 2000, des progrès considérables ont été réalisés dans la lutte contre le paludisme : les décès ont diminué de 60 %, soit près de 7 millions de vies sauvées. Rien qu’entre 2010 et 2015, les cas de paludisme ont baissé de 21 % et le taux de décès de 29 %.
Au cours du XXIe siècle, l’Organisation mondiale de la santé a confirmé l’élimination du paludisme dans sept pays, 12 autres pays ont obtenu une réduction du paludisme à zéro, et dans plus de 40 pays, moins de 10 000 cas ont été signalés.

Près de 80 % des cas de paludisme évités pendant cette période l’ont été grâce à des actions de lutte antivectorielle, telles que l’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticide de longue durée (MIILD) et la pulvérisation à effet rémanent (PER) à l’intérieur des habitations, qui permettent de prévenir la transmission. Depuis 2000, plus d’un milliard de moustiquaires imprégnées d’insecticide ont notamment été distribuées en Afrique sub-saharienne.
Des problèmes dus au progrès
Malgré ces avancées, le paludisme reste un problème mondial. Un enfant meurt encore du paludisme toutes les deux minutes. En 2016, 216 millions de cas de paludisme ont été signalés dans 91 pays, causant 445 000 décès. Par ailleurs, la charge de morbidité associée à cette maladie pèse de manière disproportionnée sur l’Afrique sub-saharienne, où sont rapportés plus de 90 % des cas de paludisme et 91 % des décès dus au paludisme.
Les pays les plus touchés sont généralement les plus pauvres. Ils ne disposent pas des infrastructures et des fonds nécessaires à la mise en place de systèmes de surveillance, ce qui signifie qu’ils ne peuvent ni évaluer la répartition de la maladie et ses tendances, ni répondre rapidement aux flambées épidémiques.

Cette situation est exacerbée par le fait que, bien que les financements destinés à la lutte mondiale contre le paludisme aient augmenté de près de 1 000 % depuis 2000, ces budgets ont tendance à stagner à l’heure actuelle. L’OMS estime que les fonds annuels devraient augmenter de 6,5 milliards de dollars (américains) par an d’ici 2020 pour atteindre son objectif de réduction des cas de paludisme et des décès liés à cette maladie de 40 % entre 2015 et 2020. Les 2,7 milliards de dollars investis dans la lutte contre le paludisme en 2016 représentent moins de la moitié (41 %) de cette somme.
Ajoutons à cela un problème de plus en plus fréquent : la résistance émergente des parasites aux antipaludéens et la résistance des moustiques aux insecticides. En 2014, 60 pays ont signalé une résistance des moustiques à au moins un insecticide contenu dans les moustiquaires et les pulvérisations à effet rémanent à l’intérieur des habitations. En outre, les MIILD et les PER n’ont aucun effet sur certains types de transmission, qui nécessiteront de nouveaux types d’actions de lutte antivectorielle.
Une nouvelle génération d’outils et de stratégies
Dès lors, comment surmonter ces obstacles ? La bonne nouvelle est que le pipeline d’innovations produit des résultats en matière de prévention, de dépistage et de traitement.
En avril 2018, les principales entreprises mondiales de protection des cultures ont uni leurs efforts à ceux de la Fondation Bill & Melinda Gates et ceux du Innovative Vector Control Consortium (IVCC) pour créer le projet Zero by 40 : un engagement des partenaires dans la recherche, le développement et l’approvisionnement de la nouvelle génération de produits de lutte antivectorielle pour sauver des vies et contribuer à l’éradication du paludisme d’ici 2040.
En associant ces produits à un accès accru aux tests de diagnostic rapide (TDR) capables de distinguer en peu de temps les fièvres paludéennes et non paludéennes, à des données de surveillance améliorées issues des pays présentant le risque le plus élevé, et à l’utilisation de médicaments antipaludéens efficaces, nous pourrions faire bouger les choses de manière durable pour réduire la charge de morbidité associée au paludisme. Nous pourrions même, un jour, espérer vaincre cette maladie définitivement.
Le monde change et nous devons trouver maintenant des solutions pour préserver notre santé, notre alimentation et notre planète. Parce que mieux vivre, c'est possible !